Implantés à Lambesc, Marjorie Blanc s’est spécialisés dans la culture et la transformation de fruits rouges. En parallèle à cette production, elle depuis plusieurs années de nombreuses pistes de diversification.
Devenir agricultrice, Marjorie Blanc avait cette idée en tête depuis quelques années, en particulier depuis un séjour dans une des fermes du réseau de coopératives « Longo Maï ». La jeune femme est dès lors séduite et travaille dans des fermes, durant l’été, lors de ses études supérieures dans le secteur de l’environnement. Mais l’opportunité de franchir le pas et de s’installer attendra quelques années. En l’occurrence, la possibilité de reprendre la ferme de ses grands-parents à Lambesc en 2011.
Les deux hectares de terres du domaine, exploités à l’époque en polyculture-élevage, sont alors en friches, et l’ancien bâtiment agricole, en piteux état, nécessite une rénovation complète. Reste à définir l’activité et le modèle agricole qu’elle souhaite mettre en œuvre, après une formation auprès des antennes de l’ADEAR 13 et 84.
L’étude de marché qu’elle entreprend en amont l’amène à opter pour les fruits rouges en agriculture bio. Une décision mûrement réfléchie, explique-t-elle :
« L’entrée en production, pour les fruits rouges, est assez rapide — entre deux et trois ans — contrairement à l’arboriculture. lis peuvent être menés sur une petite surface, entre 0,5 et 1 hectare, et avec peu de mécanisation. J’étais également sur un secteur moins concurrentiel que le maraîchage, où de nombreux acteurs sont déjà présents. Enfin, c’est une culture qui demande un bagage technique moins important. Il était également évident, dès le départ, que la transformation serait indispensable, pour espérer dégager de la valeur ajoutée, par rapport à la vente de fruits frais. D’autant que la période de production est courte. »
Avec « La cueillette à la ferme », les clients récoltent eux mêmes les fruits qu’ils consomment chez eux, en plus des produits qu’ls peuvent acheter sur place.
Des cultures à forte valeur ajoutée
Elle dispose alors de deux hectares et choisit de débuter, fin 2013, avec une plantation de framboisiers, cassissiers, groseilliers, mûriers et casseilliers (un hybride entre le groseillier à maquereau et le cassissier) sur une petite surface limitée de 0,6 ha, pour « se tester » La priorité est donnée à des variétés de framboisiers rustiques (capitou, blissy, meeker, héritage… ), précoces ou tardives et, pour certaines, remontantes, afin d’obtenir une récolte étalée depuis le début d’été jusqu’à novembre. Elle décide également de diversifier la production avec la plantation de 250 bulbes de safran à l’automne 2014, « une culture également à forte valeur ajoutée » et des fraises (ciflorette, cijosée et cirafine), cultivées en plein champ.
Marjorie investit également dans un laboratoire de transformation, où elle produit des confitures, des sorbets et des sirops très qualitatifs, commercialisés en vente directe, dans un réseau de revendeurs spécialisés (Biocoop, Marcel & Fils, BioCBon) et via l’Amap de Lambesc. Rapidement, après la phase de test, elle agrandit les surfaces cultivées, qui atteignent désormais trois hectares, en même temps qu’elle élargit la gamme des productions avec des plantes aromatiques : thym, romarin, mélisse, sauge, sarriette, menthe, lavande, fleurs de sureau, verveine, fenouil… Là encore, la transformation, « synonyme de plus value » est privilégiée: les herbes sont vendues séchées, pour être utilisées sous forme d’nfusion ou ajoutées à d’autres produits comme les sirops ou les sorbets. Car rien ne se perd, tout se transforme à « La Ferme de Cabrières » !
Bière, sirops, liqueurs, confitures, sorbets… « La Ferme de Cabrières » dispose d’une large gamme de produits issus de la production de fruits rouges de Marjorie Blanc et Adrien Roig.
Accueil touristique et pédagogique
Mais le modèle économique vertueux développé par les deux agriculteurs a néanmoins commencé à subir ses premiers coups de chaud dès 2019, avec l’apparition d’épisodes caniculaires de plus en plus importants. En dépit de l’arrosage en goutte-à-goutte, installé sur chaque rangée de plants, une partie des fruits (principalement les framboises, groseilles et cassis) est littéralement grillée sur place. « Les mûriers sont en revanche plus résistants aux effets de ces températures extrêmes » note Adrien Roig, qui a planté 80 arbres fruitiers entre les arbustes (pêchers, figuiers, pruniers notamment), avec l’objectif d’apporter un peu d’ombrage.
Il expérimente également la culture de plantes plus typiquement méditerranéennes, comme du raisin de table (500 pieds plantés) depuis 2021 et celle d’oliviers (140 arbres), dans une logique de diversification tous azimuts. Par ailleurs, au vu des baisses de rendement constatées sur les fruits rouges, le couple a décidé de s’ouvrir plus largement à l’accueil touristique et éducatif de groupes (scolaires, seniors) et de familles (ils disposaient déjà d’un gîte), en complément à sa production purement agricole. Dans le même ordre d’idée, Adrien Roig projette de transformer une parcelle en forêt comestible à vocation pédagogique : autrement dit un parcours, où il a planté des fruitiers, des arbustes et des plantes. Autre dispositif mis en œuvre par Marjorie et Adrien, celle d’une « cueillette libre » pour les visiteurs qui glanent eux-mêmes les fruits rouges dans le verger, avec des barquettes qu’ils emportent ensuite chez eux, en plus des produits vendus dans l’espace de vente de la ferme. Contre toute attente, « ils viennent chez nous afin de vivre une expérience inédite qui rappelle à certains leur enfance » note Adrien Roig, avec un sens du marketing aiguisé. Sur le plan commercial, toujours, le couple a décidé de réduire sa présence dans les marchés et foires de producteurs durant l’été, pour privilégier les événements festifs au cours desquels ils vendent leurs sorbets en cornet et leurs sirops au verre: « On achète plus facilement une glace qu’un pot de confiture ou un bac de glace. C’est typiquement un achat plaisir, d’impulsion » relève avec justesse Adrien Roig.
Julien Dukmedjlan
LES DATES ET CHIFFRES CLÉS
- Installation en 2013
- Premières productions et transformations en 2015
- 7 hectares de parcelles dont 3 ha en production
- 1,5 ha de fruits rouges (framboisiers, cassissiers, groseilliers, mûriers et caseilliers)
- 500 pieds de vigne (raisins de table),
- 80 fruitiers et 140 oliviers
L’Agriculteur Provençal du vendredi 8 septembre 2023